Par Eddy-Claude Nininahazwe
Il ya près de 7 ans aucune autorité gouvernementale n’avait foulé son pied le sol rwandais. L’année 2022 a commencé avec une exception surprise car le 10 Janvier, le président Rwandais Paul KAGAME a reçu une délégation burundaise. La délégation portait un message de son homologue burundais Evariste NDAYISHIMIYE. Elle était conduite par le ministre des activités de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est, la jeunesse et le sport, l’Ambassadeur Ezéchiel NIBIGIRA. « Le but de la visite était de promouvoir les relations bilatérales et renforcer les liens historiques entre les deux pays. » Parla le Ministre.
La présidence du Rwanda, de son côté, a indiqué que les échanges avec le président Kagame se sont focalisés sur le renforcement des relations entre le Rwanda et le Burundi. Le porte-parole du Gouvernement Rwandais, Alain MUKURALINDA a indiqué que le dialogue reste le moyen le plus direct dans la résolution des problèmes. Depuis bien de jours les deux pays affichent la détermination de normaliser les relations qui s’étaient détériorées depuis 2015. Pour rappel, lors de la célébration du 59ème anniversaire de l’indépendance du Burundi, le premier juillet 2021 le Rwanda avait été représenté par le premier ministre du Rwanda, Edouard NGIRENTE. Dans son discours au nom du président rwandais Paul KAGAME, le premier ministre avait relaté la volonté du Rwanda de normaliser les relations anciennes entre ces deux pays frères dans ces termes : « Le moment est venu pour le Burundi et le Rwanda de s’appuyer sur les fondements solides de nos liens historiques et culturels afin de parvenir à la prospérité et au développement durable. Je suis convaincu que nous sommes tous prêts à travailler pour la consolidation et la promotion des relations existantes d’amitié et de coopération au profit de nos deux peuples. », a déclaré Edouard NGIRENTE.

Le président du Burundi Evariste NDAYISHIMIYE a, pour l’occasion, apprécié ce geste du Rwanda, un signe d’une volonté affichée par les deux parties pour améliorer leurs relations. « Nous sommes prêts à ouvrir un nouveau chapitre et à enterrer la hache de guerre entre le Burundi et le Rwanda et nous sommes prêts à travailler avec le Rwanda.
» Les Rwandais et les Burundais n’ont pas besoin de médiateur pour se réconcilier, a poursuivi Evariste NDAYISHIMIYE en réaction au Discours du Premier Ministre rwandais : « Si vous le voyez bien, pour les Burundais, votre visite ici c’est comme un miracle, surtout qu’on venait de passer des jours à nous taquiner. Cette visite a un sens, une signification. Il y a un livre que nous Rwandais et Burundais avions passé des jours à écrire. Il est temps qu’on l’ouvre et le lise ensemble, puis on va le fermer et en ouvrir un nouveau. Dis au président Paul Kagame qu’on a apprécié cette visite et qu’elle nous donne un espoir ».
Sceller les relations, pour un intérêt commun Les deux pays ont intérêts d’œuvrer ensemble, vu leur histoire commune d’avoir été colonisé par un même colon, donc ce sont des pays frères, explique l’historien rwandais Gérard KARAMUTSA. Sur le plan politique, le Burundi et le Rwanda sont dans le même bloc d’intégration régionale. Cet historien trouve qu’il est impératif de travailler ensemble et dépasser les divisions politiques actuelles. Dr Guillaume NDAYIKENGURUTSE, chargé de cours en sciences politiques et relations internationales à l’Université du Burundi indique que la délégation envoyée à est une forme de réciprocité pour réaffirmer la volonté des deux côtés afin d’assainir le climat entre les deux pays. « En quelque sorte dans un processus qui est appelé à résoudre un problème, un conflit interétatique très profond » insiste le Dr Guillaume NDAYIKENGURUTSE qui pour lui, Il ne reste qu’une rencontre entre les présidents burundais et rwandais pour sceller leurs relations. « La rencontre entre les deux chefs d’états s’avère une étape cruciale car c’est à ce niveau que les grandes décisions sont prises, les Etats posent des conditions pour résoudre un différend, chacun de son côté, il y a lieu même de céder certaines conditions pour la bonne marche du processus » conclut Guillaume Ndayikengurutse.
Des gestes tangibles pour la normalisation des relations Au lendemain des élections de 2020 qui porta à la présidence Evariste NDAYISHIMIYE, les nouvelles autorités burundaises ont manifesté leur volonté de normaliser les relations avec Kigali. En juillet de l’année dernière 2021, les autorités rwandaises ont remis au Burundi, dix neufs rebelles burundais capturés en septembre 2020 sur le sol rwandais, des rebelles du mouvement de résistance pour la restauration d’un Etat de droit, (RED TABARA). Trois mois plus tard, le 20 octobre 2021, ce fut le tour du Burundi de transférer à son voisin rwandais onze membres de la rébellion des FLN (Front de libération nationale du Rwanda) capturés par l’armée burundaise lors de violents affrontements dans la forêt , de Kibira, frontalière du Rwanda.

Le 15 octobre 2021, une rencontre a eu lieu à la frontière burundaise rwandaise de Ruhwa, à l’ouest du Burundi entre la délégation burundaise conduite par le gouverneur de Cibitoke et celle du Rwanda conduit par le gouverneur de l’Ouest. Les deux délégations ont noté une amélioration de la situation sécuritaire sur la frontière commune et ont souhaité une reprise des échanges commerciaux. Peu après, en date du 25 octobre 2021, les gouverneurs des provinces de l’est et du sud du Rwanda et ceux de Kirundo et de Muyinga au nord-est Burundi se sont rencontrés au poste frontalier de Gasenyi-Nemba, province de Kirundo. Les échanges portent aussi sur la situation sécuritaire sur les frontières communes.

En février, s’exprimant sur les affaires extérieures du Rwanda, au Parlement, le Président rwandais Paul Kagame a annoncé que la normalisation des relations avec le Burundi semblait aller dans la meilleure direction « les problèmes entre le Rwanda et le Burundi, « y compris l’insécurité le long de la frontière commune, seront bientôt éliminés pour que les habitants de nos deux pays puissent se déplacer librement à travers les frontières. », a déclaré Paul KAGAME
Les relations diplomatiques entre les deux pays se sont détériorées depuis 2014 et 2015 quand les deux se sont accusées mutuellement de vouloir déstabiliser l’un à l’autre.